Fou du flou

30 mai 2021

Suite à mon article sur les Mpx, je poursuis ma réflexion sur l’obsession de la netteté. Les moyens techniques mis à notre disposition permettent de réaliser des photos incroyablement nettes, voire « chirurgicales ». Cette nouvelle mode, alimentée également par les fameux curseurs « texture » et « clarté », donne lieu à une nouvelle esthétique.

Au mieux, nous avons des images d’un hyperréalisme époustouflant. Au pire, des photos qui piquent les yeux, les détails débordent et donnent un aspect irréel, désagréable.

Mais à bien y réfléchir, le « vrai » travail d’un photographe, c’est de gérer le flou ! Car la netteté c’est assez binaire : c’est net, ou pas. Et pour être net, soit vous faites confiance à votre AF (très performant pour la quasi totalité des boîtiers) soit à votre oeil (ou au peaking) en manuel. Mais finalement…rien de bien extraordinaire. C’est net là où vous voulez.

Alors oui, il y a quelques difficultés à bénéficier de la netteté au bon endroit. La profondeur de champ ultra courte, le manque de luminosité (et donc d’erreur de l’AF), les problèmes de back/front focus viennent perturber la mise au point. Mais soyons honnête, dans la majorité des cas, c’est net là où l’on souhaite. Aussi, il n’y a pas vraiment d’enjeu pour un photographe à gérer cette netteté.

Mais le fou c’est autre chose. Quel type de flou : vitesse, profondeur de champ ? Quel genre de flou : généreux, léger, très rond… ? Nombreux sont les paramètres à entrer dans la génération du flou.

Vous pouvez générer du flou grâce à l’utilisation de la vitesse. Et s’ouvre à vous la palette des flous de mouvement du sujet. Donner ce léger sentiment de dynamisme pour éviter l’effet « statue ». avec une vitesse « un peu lente » (1/30ème pour une personne en léger mouvement). Montrer la rapidité du mouvement avec un filé (vitesse entre 1/60 et 1/125) avec suivi du sujet. Exagérer la vitesse en mettant l’appareil sur pied et une vitesse lente (1/10ème voire moins) pour donner l’illusion que le sujet va très vite tout en bénéficiant d’un arrière plan net. Enfin, la pause très longue (30 sec et plus) afin que le sujet s’étire et finisse par être abstrait (l’eau devient un nuage).

Le flou de profondeur de champ va générer un autre flou, celui de la profondeur. Effet naturel puisque notre vision possède une profondeur de champ relativement courte. Pour plus de précision technique reportez-vous à mon article : WTF PDC ? Ce flou permet de donner l’illusion de la profondeur ou de masquer complètement le fond.

Le flou dépend de la qualité de votre optique et notamment de son diaphragme. Un aspect peu connu est le nombre et la forme des lamelles du diaphragme de votre objectif. Cette information est toujours donnée par le constructeur, jetez-y un coup d’oeil. Plus il y a de lamelles, plus l’effet de bokeh sera doux (les tâches de lumière tendent vers le cercle parfait). Et il y a également la forme des lamelles. Certaines sont arrondies, accentuant l’effet précédemment cité.

La prochaine fois que vous acheterez un objectif, arrêtez-vous un instant sur cette donnée. Quelle flou je souhaite ? Et regardez la qualité des lentilles et surtout du diaphragme.

Et lorsque vous photographiez, posez-vous la question du flou. Profondeur ? Mouvement ? Léger trouble ? Masquer une réalité ? Et vous comprendrez que finalement, photographier, c’est gérer le flou.

    Leave a comment

Total: